Vortex Flower, 2021
Graphisme on silk, 600X600, 450X450 cm, 2021
Exposition view at Fiminco Foundation, Romainville, France
Qui regarde attentivement le calice d’une fleur, l’enveloppe d’une bulle de savon pourrait finir par y voir un modèle mathématique parfait. Joon Yoo y trouve le point de rencontre entre microcosme et macrocosme, une invitation à la contemplation. Avec l’installation Vortex Flowers, l’artiste imprime sur soie de grandes images de fleurs. En jouant des agrandissements et des possibilités infinis d’étendre une image numérique, elle révèle les trames et se joue des modèles scientifiques. Si un temps le nombre d’or était un outil qui permettait de représenter le réel par un système de juste proportion, le point devient une unité qui permet de recomposer le monde en jouant des perceptions. Dans ses vidéos, ses partitions ou installations, l’artiste met de son côté en place une méthode empirique qui valorise l’expérience intime du réel. La persistance d’un son aigu dans le désert ouvre le recueil musical Universe Memory et la partition tord les systèmes graphiques habituels de transcription de la musique. Comment transmettre une émotion si forte quand la langue paraît commune ou usée ? A force de souffle, elle va dans les creux du langage, où le vent rejoint la respiration.
En formant des bulles et en nous proposant de les suivre dans One Art, elle exerce notre attention sur les silences qui bordent les mots, les parois iridescentes qui encercle un vide. Les objets qui intéressent Joon Yoo pourrait tenir de la vanité ; en contemplant l’image agrandie d’une fleur, elle nous propose de se perdre dans la trame jusqu’à ressentir le vertige.
Henri Guette
Future, 2021
Engraving, four-color photogravure (cyan, yellow, magenta, fluorescent pink) on Hahnemühle 100% cotton paper, 300g, paper dimensions 125x106cm
Univers Memory, 2021
Engraving, 21 pages of experimental music score, Produced with support from the Fiminco Foundation, 2021
Exposition view Freedom of Sleep Cur Annabelle Lacroix, at Fiminco Foundation
Au commencement était un son.
Un son électronique dans un désert, qui emplit l’espace. Il n’y a aucun mur, aucun relief pour lui faire obstacle. Il est le maître des lieux, et se di use partout. S’insinue partout. Nul besoin de s’évertuer à en chercher l’origine. Il se forme à des kilomètres d’ici. Il émet aussi en nous. Nous sommes chargés d’électricité. Ce son nous transforme en émetteur-récepteur.
Omniprésent et omnipotent, il a tué le silence. L’oreille humaine ne peut plus écouter le silence, ni l’accepter. Le silence dé e même les funambules, et gagne toujours. Sans bruit, plus d’équilibre. Ce son est, peut-être, notre perche qui oscille entre droite et gauche, et nous empêche de tomber. Il est aussi, sans doute, un l suspendu dans le temps et l’espace.
Le son est à l’origine d’une série de dessins de Joon Yoo. D’abord de simples dessins à main levée, sur des feuilles volantes. Puis des dessins travaillés à l’ordinateur, qui composent un opéra visuel. Il y a des actes, et à l’intérieur de chaque acte, six scènes. L’in ni de l’univers, la trajectoire orbitale des planètes d’un côté, l’élan de la marche humaine de l’autre. Le très grand et le très petit sont co-présents dans ces dessins. Joon Yoo trace en 2D les contours de l’espace 3D. Partitions expérimentales, elles ont une double nalité. Dans un premier temps, elles sont destinées à être jouées par un instrument musical pour produire un son expérimental et nouveau. Elles ont également vocation à être lues visuellement. La portée, les cinq lignes classiques d’une partition, n’est plus horizontale comme il est d’usage. Elle devient courbe, boucle, s’éclate en lignes nes et imprévisibles sur l’espace papier. C’est ici, précisément ici, que le jeu entre les di érents espaces et dimensions prend tout son sens. Sur l’espace plan du papier, les lignes s’envolent, se fragmentent, avec pour objectif et conséquence une résonance dans l’espace tridimensionnel, celui de la vie, qui soit innovante et radicale. La liberté créatrice du dessin s’accompagne d’une sonorité encore inconnue di usée dans l’espace physique.
Musique optique ou bien poésie visuelle, ces partitions traduisent une langue universelle, qui n’a pas besoin d’alphabet. Pas de a, ni b, ni c, mais des traits. Elles parlent le langage de nos émotions et de leurs ondes, des vibrations de notre corps dans l’espace, du passage du temps. Avec des règles, et des in nies variations, du pianissimo à l'arpeggio, Joon Yoo crée un ouvroir de poésie potentielle.
chapter 0
Incognito
chapter 1
Myriade
chapter 2
Continuum
chapter 3
Trajectories
chapter 4
Gradiva
chapter 5
Navigate
Gradiva, 2021
performance, eproduction of the feet of Gradiva based on the bas-relief preserved at the Vatican Museum, 3D printing, PLA material, 20cm in length, costume,
live diffusion of the artist’s breath, anti-facial recognition makeup, 15 minutes
L’acte Gradiva, inspiré du bas-relief éponyme de Pompéi, sera le point de départ de
la performance de Joon Yoo pour l’exposition Freedom of Sleep. À partir des dessins
d’un mouvement permanent, de la mise en action inévitable de nos corps, Joon Yoo souhaite créer une performance marchée. Elle o rira une interprétation physique du rythme sociétal qui s’impose à nos consciences et à nos corps, une incarnation de l’accélération forcée de nos modes de vie. Le travail de Joon Yoo est imprégné de cette domination temporelle de la société sur les individus.
Son dessin, ses vidéos et performances cherchent à trouver une parade à notre impuissance. Notre impuissance à composer le temps, à le décider, à s’a ranchir de ses obligations. Le travail de Joon Yoo o re un répit. C’est fuite en avant vers la liberté et une manière d'échapper à cette “Time Machine Infernale” qui nous broie. La performance réalisée pour Freedom of Sleep permet à l’artiste d'extérioriser, d’expulser par le corps ce que la société lui dicte.
L’expérience du temps, des rythmes temporels trouvera une personnification dans l’espace d’exposition, et ainsi la boucle de Joon Yoo est bouclée : de l’invisible au visible, du mental au corporel, du lisse au relief, du dessin à la sonorité, du temps à l’espace.
Andréanne Béguin